Evangile du dimanche des Rameaux| Commentaires de Marie Noëlle Thabut28 mars 2021
Evangile du dimanche des Rameaux| Commentaires de Marie Noëlle Thabut Eglise Catholique.fr | Publié le 22 mars 2021 Extraits de la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ selon Saint Marc : Mc 15, 1…39 Dès le matin, les grands prêtres convoquèrent les anciens et les scribes, et tout le Conseil suprême. Puis, après avoir ligoté Jésus, ils l’emmenèrent et le livrèrent à Pilate. Celui-ci l’interrogea : « Es-tu le roi des Juifs ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui le dis. » Les grands prêtres multipliaient contre lui les accusations. Pilate lui demanda à nouveau : « Tu ne réponds rien? Vois toutes les accusations qu’ils portent contre toi. » Mais Jésus ne répondit plus rien, si bien que Pilate fut étonné. Les soldats l’emmenèrent à I’intérieur du palais, c’est-à-dire dans le Prétoire. Alors ils rassemblent toute la garde, ils le revêtent de pourpre, et lui posent sur la tête une couronne d’épines qu’ils ont tressée. Puis ils se mirent à lui faire des salutations, en disant : « Salut, roi des Juifs. » Ils lui frappaient la tête avec un roseau, crachaient sur lui, et s’agenouillaient pour lui rendre hommage. Quand ils se furent bien moqués de lui, ils lui enlevèrent le manteau de pourpre, et lui remirent ses vêtements. Puis, de là, ils l’emmenèrent pour le crucifier, et ils réquisitionnent, pour porter sa croix, un passant, Simon de Cyrène, le père d’Alexandre et de Rufus, qui revenait des champs. Et ils amènent Jésus au lieu dit Golgotha, ce qui se traduit Lieu-du-Crâne (ou Calvaire). Ils lui donnaient du vin aromatisé de myrrhe ; mais il n’en prit pas. Alors ils le crucifient, puis se partagent ses vêtements, en tirant au sort pour savoir la part de chacun. C’était la troisième heure (c’est-à-dire neuf heures du matin) lorsqu’on le crucifia. L’inscription indiquant le motif de sa condamnation portait ces mots : «Le roi des Juifs». Le centurion qui était là en face de Jésus, voyant comment il avait expiré, s’écria : « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu!» La solitude de Jésus et son silence Tout d’abord, on notera deux particularités de la Passion chez Marc : la solitude de Jésus et son silence. La solitude de Jésus : dans la Passion selon Saint Marc, Jésus est particulièrement seul ; après le reniement de Pierre, Marc ne note plus aucune présence amicale à ses côtés ; les femmes sont citées, mais seulement après sa mort. Quant à son silence, il est impressionnant : quelques mots seulement au procès, et ensuite, note Marc, « Jésus ne répondit plus rien ». Et Pilate lui-même s’en étonne : « Pilate l’interrogeait de nouveau : Tu ne réponds rien ? Vois toutes les accusations qu’ils portent contre toi. Mais Jésus ne répondit plus rien, de sorte que Pilate était étonné. » (Mc 15,4-5) Puis, sur la croix une seule parole : « Eloï, Eloï, lama sabactani ? » Interprétés par un soldat romain, ces mots sonnent comme un cri de désespoir ; mais un Juif ne s’y serait pas trompé : ce sont les premiers d’un chant de victoire ; puisque, nous l’avons vu en étudiant le psaume 21/22, celui-ci n’est aucunement un cri de désespoir, ni même de doute ! Devant cette solitude et ce silence de Jésus, on se demande forcément « quel est son secret ? ». Il passe en peu de temps de la popularité à la déchéance, de l’entrée royale dans la ville à l’exclusion et l’exécution hors de la ville, de la reconnaissance comme envoyé de Dieu (« Béni soit au nom du Seigneur celui qui vient ») à la condamnation pour blasphème et à l’exécution au nom de la Loi, ce qui signifiait aux yeux de tous qu’il était maudit de Dieu. Reconnu comme le Messie, c’est-à-dire le roi d’Israël, le libérateur, le sauveur par ses disciples et toute une foule enthousiaste, il est liquidé rapidement après un procès monté de toutes pièces. Il s’est laissé faire dans le triomphe, il se laisse faire plus encore dans la persécution. Ce faisant, il garde encore le secret qu’il a gardé toute sa vie ; c’est seulement après sa Résurrection que ses disciples pourront enfin comprendre. Il semble bien que cette sobriété du récit de Marc vise à faire ressortir deux aspects du mystère de Jésus : Messie-Roi et Messie-Prêtre. Le Messie-roi qu'on attendait Messie-Roi : que ce soit sous forme de question, de dérision, d’affirmation, la royauté du Christ est bien au centre du récit. La première question que Pilate pose à cet homme qu’on lui amène, ligoté, c’est « Es-tu le roi des Juifs ? » Il n’obtient qu’une réponse sibylline « C’est toi qui le dis » (15,2). Dans la suite, Pilate donne deux fois ce titre à Jésus « Voulez-vous que je vous relâche le roi des Juifs ? » (v. 9) et « Que ferai-je donc de celui que vous appelez le roi des Juifs ? » (v. 12). Et, curieusement, personne ne dira le contraire ! Suit la parodie des soldats, le manteau, la couronne et les acclamations « Salut, roi des Juifs ! » (15,18). Et puis, cet écriteau en haut de la croix, mal intentionné peut-être, mais qui annonce quand même à tous les passants « celui-ci est le roi des Juifs » (15,26). Même les grands prêtres et les scribes en se moquant lui donnent ce titre : « Il en a sauvé d’autres, et il n’est pas capable de se sauver lui-même ! Le Messie, le roi d’Israël, qu’il descende maintenant de la croix. » (15,32). Le Messie prêtre qu'on attendait Deuxième aspect du mystère de Jésus mis en lumière par le récit de Marc, il est le Messie-Prêtre : il y avait des grands prêtres en exercice et ce sont eux qui ont joué le premier rôle dans la condamnation et la mort de Jésus. Ce sont eux qui amènent Jésus chez Pilate et qui veillent au bon déroulement des opérations : « Dès le matin, les grands prêtres tinrent conseil avec les Anciens, les scribes et le Sanhédrin tout entier. Ils lièrent Jésus, l’emmenèrent et le livrèrent à Pilate. » Un peu plus tard, ce sont eux qui excitent la foule pour qu’elle réclame la libération de Barabbas : « Les chefs des prêtres soulevèrent la foule pour qu’il leur libérât plutôt Barabbas. » (Mc 15,11). Pilate lui-même n’est pas dupe, puisque Marc précise : « Pilate voyait bien que les grands prêtres l’avaient livré par jalousie. » (Mc 15,10). Une jalousie justifiée, si l’on veut bien admettre que, de bonne foi, ils se sont inquiétés du succès de Jésus, qui, à leurs yeux, entraînait le peuple vers de fausses espérances. Mais le vrai prêtre, le Messie-prêtre qu’on attendait, c’est lui. Car Marc est le seul avec Jean à parler de pourpre pour le vêtement remis à Jésus pour se moquer de lui. Or la pourpre était la couleur des vêtements des rois et des grands prêtres. Suprême dérision : ceux qui portaient cette pourpre passeront à côté de la vérité. C’est d’un païen que vient la première profession de foi : « Vraiment, cet homme était Fils de Dieu ! »
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Evangile du dimanche 14 mars 2021 (mi-carême). Commentaires de Marie-Noëlle Thabut14 mars 2021
Evangile du dimanche 14 mars 2021 (mi-carême). Commentaires de Marie-Noëlle Thabut Eglise Catholique.fr Evangile selon saint Jean 3, 14 – 21 De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. Car Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Car Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Celui qui croit en lui échappe au Jugement ; celui qui ne croit pas est déjà jugé, du fait qu’il n’a pas cru au nom du Fils unique de Dieu. Et le Jugement, le voici : la lumière est venue dans le monde, et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises. Celui qui fait le mal déteste la lumière : il ne vient pas à la lumière, de peur que ses oeuvres ne soient dénoncées ; 21 mais celui qui fait la vérité vient à la lumière, pour qu’il soit manifesté que ses œuvres ont été accomplies en union avec Dieu. Le serpent de bronze Commençons par l’épisode du serpent de bronze ; cela se passe dans le désert du Sinaï pendant l’Exode à la suite de Moïse. Les Hébreux étaient assaillis par des serpents venimeux ; et comme ils n’ont pas la conscience très tranquille (parce qu’une fois de plus ils ont « récriminé », « murmuré », comme dit souvent le livre de l’Exode), ils sont convaincus que c’est une punition du Dieu de Moïse ; ils vont donc supplier Moïse d’intercéder pour eux : « Le peuple vint trouver Moïse en disant : Nous avons péché en critiquant le SEIGNEUR et en te critiquant ; intercède auprès du SEIGNEUR pour qu’il éloigne de nous les serpents ! » Dans ces cas-là, d’habitude, il y avait une coutume qui consistait à dresser un serpent de bronze sur une perche. Ce serpent de bronze représentait le dieu guérisseur. Quand un homme était mordu par un serpent, on était convaincu qu’il suffisait de lever les yeux vers le serpent pour être guéri. A notre grand étonnement, quand les gens vont trouver Moïse pour se plaindre des serpents, il conseille de faire comme d’habitude : « Moïse intercéda pour le peuple et le SEIGNEUR lui dit : ‘Fais faire un serpent brûlant (c’est-à-dire venimeux) et fixe-le à une hampe : quiconque aura été mordu et le regardera aura la vie sauve.’ Moïse fit un serpent d’airain et le fixa à une hampe ; et lorsqu’un serpent mordait un homme, celui-ci regardait le serpent d’airain et il avait la vie sauve. » (Nb 21,7-9). A première vue, nous sommes en pleine magie, en fait, c’est juste le contraire : Moïse transforme ce qui était jusqu’ici un acte magique en acte de foi. Une fois de plus, comme il l’a fait pour des quantités de rites, Moïse ne brusque pas le peuple, il ne part pas en guerre contre leurs coutumes ; il leur dit : « Faites bien tout comme vous avez l’habitude de faire, mais ne vous trompez pas de dieu, il n’existe qu’un seul Dieu, celui qui vous a libérés d’Egypte. Faites-vous un serpent, et regardez-le : (en langage biblique, « regarder » veut dire « adorer ») ; mais sachez que celui qui vous guérit, c’est le Seigneur, ce n’est pas le serpent. Quand vous regardez le serpent, que votre adoration s’adresse au Dieu de l’Alliance et à personne d’autre, surtout pas à un objet sorti de vos mains ». Jésus reprend cet exemple à son propre compte : « De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin que tout homme qui croit obtienne par lui la vie éternelle ». De la même manière qu’il suffisait de lever les yeux avec foi vers le Dieu de l’Alliance pour être guéri physiquement, désormais, il suffit de lever les yeux avec foi vers le Christ en croix pour obtenir la guérison spirituelle. Ils lèveront les yeux vers celui qu'ils ont transpercé C’est le même Jean qui dira, au moment de la crucifixion du Christ : « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé » (Jn 19,37). Ils « lèveront les yeux », cela veut dire « ils croiront en Lui, ils reconnaîtront en lui l’amour même de Dieu ». Une fois de plus, Jean insiste sur la foi : car nous restons libres ; face à la proposition d’amour de Dieu, notre réponse peut être celle de l’accueil (ce que Jean appelle la foi) ou du refus ; comme il le dit dans le Prologue de son évangile, « Le Verbe était la vraie lumière qui, en venant dans le monde, illumine tout homme. Il était dans le monde, et le monde fut par lui, et le monde ne l’a pas reconnu. Il est venu dans son propre bien et les siens ne l’ont pas accueilli. Mais à ceux qui l’ont reçu, à ceux qui croient en son nom, il leur a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu. » (Jn 1,9-12). Dans le texte d’aujourd’hui, Jésus lui-même reprend ce thème avec force : « Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils unique : ainsi tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. » A noter que le mot « croire » revient cinq fois dans ce passage. Mais en même temps que Jésus fait un rapprochement entre le serpent de bronze élevé dans le désert et sa propre élévation sur la croix, il manifeste le saut formidable entre l’Ancien Testament et le Nouveau Testament. Jésus accomplit, certes, mais tout en lui prend une nouvelle dimension. Tout d’abord, dans le désert, seul le peuple de l’Alliance était concerné ; désormais, en Jésus, c’est tout homme, c’est le monde entier, qui est invité à croire pour vivre. Deux fois il répète « Tout homme qui croit en lui obtiendra la vie éternelle ». Ensuite, il ne s’agit plus de guérison extérieure, il s’agit désormais de la conversion de l’homme en profondeur ; quand Jean, au moment de la crucifixion du Christ, écrit : « Ils lèveront les yeux vers celui qu’ils ont transpercé » (Jn 19,37), il cite une phrase du prophète Zacharie qui dit bien en quoi consiste cette transformation de l’homme, ce salut que Jésus nous apporte : « Ce jour-là, je répandrai sur la maison de David et sur l’habitant de Jérusalem, un esprit de bonne volonté et de supplication. Alors ils regarderont vers moi, celui qu’ils ont transpercé » (Za 12,10). L’esprit de bonne volonté et de supplication, c’est tout le contraire des récriminations (ou des murmures) du désert, c’est l’homme enfin convaincu de l’amour de Dieu pour lui. Visiblement, pour la première génération chrétienne, la croix était regardée non comme un instrument de supplice, mais comme la plus belle preuve de l’amour de Dieu. Comme dit Paul, « Nous prêchons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les païens… Mais ce Messie est puissance de Dieu et sagesse de Dieu. Car ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes et ce qui est faiblesse de Dieu est plus fort que les hommes » (1 Co 1,23-25). Il y a donc deux manières de regarder la croix du Christ : elle est, c’est vrai, la preuve de la haine et de la cruauté de l’homme, mais elle est bien plus encore l’emblème de la douceur et du pardon du Christ ; il accepte de la subir pour nous montrer jusqu’où va l’amour de Dieu pour l’humanité. La croix est le lieu même de la manifestation de l’amour de Dieu : « Qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14,9). Sur le Christ en croix, nous lisons la tendresse de Dieu, quelle que soit la haine des hommes. Et cet amour est contagieux : en le regardant, nous nous mettons à le refléter. |
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