Covid long: ces malades chez qui les symptômes s’éternisent23 décembre 2020
Covid long: ces malades chez qui les symptômes s’éternisent Le Figaro.fr | Publié le 22 décembre 2020 | 17:58 Par Delphine Chayet Neuf mois après son Covid-19, Sandrine commence tout juste à «s’en sortir». Les mots ne sont pas choisis à la légère par cette secrétaire âgée de 46 ans. Contaminée en mars dernier, elle a eu besoin d’un soutien en oxygène à l’hôpital. Guérie, elle est rentrée chez elle. Mais l’essoufflement, la fatigue « écrasante» et l’oppression thoracique ne se sont pas dissipés au bout de quelques jours, ni même de quelques semaines. Et des symptômes intermittents sont apparus. Des modifications du goût, des troubles digestifs, des nausées, des tremblements des membres, les mains glacées, des sensations de brûlure sur certaines parties du corps, des frissons, une perte de cheveux, des éruptions cutanées… Comme elle, de nombreuses personnes infectées par le Covid peinent à se rétablir. Leurs symptômes persistent au-delà de deux mois, ou ont ressurgi après une accalmie. Très variés, plus ou moins intenses et durables, ces troubles qui s’éternisent sont désormais officiellement appelés «Covid long». Le syndrome a été reconnu en août par l’OMS. Il est pris très au sérieux au Royaume-Uni, où une quarantaine de consultations dédiées ont été créées. «L’impression de devenir fou» On ignore combien de personnes sont concernées, en l’absence d’étude de grande ampleur. Une enquête téléphonique menée à Genève auprès de 700 patients soignés en ville a montré qu’un tiers d’entre eux ont encore un symptôme quatre à six semaines après leur diagnostic. Le plus souvent une fatigue (14 %), une perte du goût et de l’odorat (12 %) ou un essoufflement (9 %). Plus rarement une toux (6 %) ou des maux de tête (3 %). Une personne sur dix serait encore concernée au bout de trois mois, selon une étude anglaise. «Rapportés aux millions de personnes contaminées depuis le début de la pandémie, ces pourcentages interpellent», note le Dr Mayssam Nehme, auteur principale de l’étude suisse (Annals of Internal Medicine). Des signes cliniques tardifs avaient déjà été constatés en 2003 à la suite de l’épidémie de Sars. On les retrouve aussi après le Chikungunya, qui laisse souvent dans son sillage des fièvres et des douleurs articulaires. « En réalité, toutes les pathologies infectieuses peuvent donner lieu à des formes traînantes », souligne le Dr Benjamin Davido, infectiologue à l’hôpital de Garches, intrigué par les ressemblances entre Covid long et syndrome de fatigue chronique. Souvent inexpliqué, ce dernier est «très certainement déclenché par des agents infectieux non repérés». Dans les deux cas, les malades se plaignent d’une fatigue extrême, qui les cloue au lit, comme de troubles de la mémoire ou de douleurs articulaires. Les bilans sanguins et examens d’imagerie ne révèlent pourtant aucune anomalie. «La plupart du temps, nous ne trouvons pas de cause biologique», confirme le Pr Salmon. Pour expliquer ce puzzle de symptômes, les chercheurs avancent plusieurs hypothèses. Parmi elles, la persistance du virus dans l’organisme (démontrée chez certains malades), une inflammation des vaisseaux sanguins ou une réponse immunitaire inadaptée qui se prolonge en raison d’un terrain génétique particulier par exemple. «La piste d’une dérégulation du système nerveux autonome, qui commande la respiration et la digestion, doit également être explorée», avance le Dr Benjamin Davido, auteur d’une étude qui lançait l’alerte en juillet. Les causes psychologiques ne sont pas oubliées: le stress causé par une maladie nouvelle laisse des traces. Enfin, la sédentarité liée au confinement a pu entraîner une «désadaptation» à l’effort de l’organisme, qui pourrait expliquer un essoufflement ou des palpitations cardiaques durables. Un essai clinique à l’hôpital Foch, conduit par le Dr Nicolas Barizien, est en cours pour vérifier les liens entre l’hypoxie subie pendant l’infection et ce Covid long. Le chercheur a en effet constaté de «fortes similitudes» entre les symptômes post-Covid et les troubles ressentis par des sportifs de haut niveau qui s’entraînent en altitude. «Il reste encore beaucoup de choses à comprendre», résume le Dr Davido. La prise en charge est pour l’heure purement symptomatique: des exercices de rééducation à l’effort, des thérapies contre l’anxiété, de l’aspirine pour soulager les péricardites, etc. «Un bilan minutieux doit être réalisé, afin de ne pas rater une maladie qui pourrait être soignée », précise l’infectiologue. «Nous conseillons aux patients d’économiser leurs efforts physiques et intellectuels, ajoute sa consœur de l’Hôtel-Dieu, et nous écoutons leur détresse.» Son service s’apprête à lancer une étude nationale portant sur mille patients aux prises avec un Covid long , afin de mieux cerner leurs troubles et y répondre.
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