Shutdown : Trump essuie le plus cinglant revers de sa présidence27 janvier 2019
Shutdown : Trump essuie le plus cinglant revers de sa présidence Le Monde.fr | Publié le 26 janvier 2019 | 6:11 Par Gilles Paris (correspondant à Washington) Donald Trump a tenté de sauver les apparences, vendredi 25 janvier. Il s’est dit « très fier » d’être parvenu « à un accord pour mettre fin au shutdown »(« fermeture ») d’un quart du gouvernement fédéral. Lorsqu’il a quitté la roseraie de la Maison Blanche, choisie pour cette annonce, les conseillers et les membres de son cabinet présents l’ont applaudi. Il venait pourtant d’essuyer l’un des plus cinglants revers de sa présidence. Après de premiers signes de désordre dans le transport aérien à New York, faute d’assez d’aiguilleurs du ciel, le président des Etats-Unis s’est en effet résigné à accepter à l’identique ce qu’il avait refusé le 21 décembre 2018, plongeant 800 000 fonctionnaires fédéraux dans l’incertitude. Après le plus long shutdown de l’histoire du pays, il a accepté un financement temporaire des départements concernés, jusqu’au 15 février, sans obtenir le moindre dollar pour le mur qu’il souhaite ériger sur la frontière avec le Mexique. Les fonctionnaires recevront leurs salaires gelés pendant cette période, au contraire cependant de milliers de sous-traitants. Le financement de ce projet auquel les démocrates sont opposés va faire l’objet de négociations pour lesquelles Donald Trump arrive en position de faiblesse. Pendant les cinq semaines de shutdown, le président a tout tenté pour convaincre les Américains de l’existence d’une « crise » à la frontière : allocution solennelle, déplacement sur place, tables rondes à la Maison Blanche, pluie de messages alarmistes publiés sur son compte Twitter. Rien n’y a fait. Formules maladroites Le président des Etats-Unis a également instillé le doute au sein de son propre camp sur sa capacité à livrer et à remporter les « victoires » dont il avait juré pendant la campagne présidentielle que sa base finirait par se lasser. La direction républicaine avait tenté de le dissuader de se lancer dans cette épreuve de force faute d’avoir les voix nécessaires au Congrès. Il est pourtant passé outre. Nul doute que le camp républicain aurait fini par se fracturer si le blocage avait perduré plus longtemps, comme en avait attesté un déjeuner tendu au Sénat, jeudi, avec le vice-président Mike Pence. Pendant les cinq semaines de shutdown, Donald Trump et certains membres de son administration ont également donné l’impression de minimiser l’épreuve subie par les fonctionnaires et l’impact grandissant du blocage. Le président a tenté de se rattraper, vendredi, en exprimant dès le début de son intervention son admiration pour « les incroyables travailleurs fédéraux et leurs familles exceptionnelles, qui ont fait preuve d’un dévouement véritablement extraordinaire ». Il aura cependant du mal à effacer l’impression entretenue par des formules maladroites ou désinvoltes. Donald Trump a bien menacé vendredi de bloquer à nouveau partiellement le gouvernement dans trois semaines en cas d’échec avec les démocrates, mais sa reculade et la dégradation continue de sa cote de popularité en cinq semaines rendent cette menace peu crédible. « Espérons que le président a retenu la leçon », a noté le chef de la minorité démocrate du Sénat, Chuck Schumer, le grand vainqueur de l’épreuve avec la speaker (présidente) démocrate de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi. La dernière carte qu’il lui reste, un état d’urgence nationale permettant de contourner le Congrès, devient moins crédible chaque jour qui passe sans que cet état d’urgence ne soit déclaré. Il pourrait d’ailleurs être bloqué par la justice. Echecs retentissants La négociation qui va s’ouvrir va être d’autant plus difficile qu’elle a été précédée, en 2018, par des échecs retentissants. Donald Trump a ainsi repoussé une proposition démocrate de 25 milliards de dollars (22 milliards d’euros) pour le mur en échange de la régularisation de sans-papiers arrivés enfants aux Etats-Unis et privés de protection juridique contre des expulsions par le président. Il a ensuite torpillé un accord bipartisan sous la pression de son aile droite après avoir assuré qu’il soutiendrait tout compromis venu du Congrès. Cette même aile droite, qui avait fait pression avec succès en décembre 2018 sur Donald Trump pour refuser le financement temporaire d’une partie du gouvernement fédéral, a réagi vendredi avec virulence après sa capitulation. « Bonne nouvelle pour George H. W. Bush, depuis ce jour il n’est plus la plus grande mauviette à avoir occupé la fonction de président des Etats-Unis », a commenté la pamphlétaire anti-immigration Ann Coulter sur son compte Twitter. Cette aile droite guette déjà de nouvelles concessions. Les démocrates, qui ont voté par le passé en faveur de tronçons de barrière à la frontière, ont annoncé qu’ils pourraient soutenir certaines mesures destinées à renforcer sa sécurité, notamment sur les points de passage légaux par lesquels transite la majorité du trafic de drogue, contrairement à ce que laisse entendre le président. Ils sont de même prêts à augmenter le nombre de gardes-frontières, ou de juges pour traiter le million de dossiers de demandes d’asile aujourd’hui en souffrance. Mais ils pourraient, en contrepartie, revenir à la charge sur le dossier des jeunes sans-papiers. Il était dit que ce vendredi serait défavorable aux slogans scandés dans les meetings de Donald Trump. Pour la formule « Build that wall ! », qui ne parvient pas à se traduire sur le terrain, comme pour celle qui promettait la prison à l’ancienne candidate démocrate à la présidentielle Hillary Clinton (« Lock her up ! »). C’est en effet un vieux complice du président, Roger Stone, qui a été arrêté et inculpé à l’aube en Floride, en lien avec l’enquête « russe », avant d’être libéré sous caution avec interdiction de quitter le territoire.
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