Les difficultés judiciaires et politiques s’accumulent pour Donald Trump17 décembre 2018
Les difficultés judiciaires et politiques s’accumulent pour Donald Trump Le Monde.fr | Publié le 16 décembre 2018 | 6:23 Par Gilles Paris (Washington correspondant) Donald Trump a surmonté tant d’obstacles depuis son entrée en politique que l’on peut être tenté de relativiser la somme des mauvaises nouvelles enregistrées au cours d’une semaine difficile. Cette dernière s’est conclue provisoirement, vendredi 14 décembre, par de nouvelles accusations de son ancien avocat, Michael Cohen, et par la révélation du Wall Street Journal selon laquelle la justice s’intéresse désormais au financement des cérémonies d’investiture qui avaient accompagné son arrivée à la Maison Blanche, en janvier 2017. L’accumulation d’embarras à laquelle fait face Donald Trump est sans précédent. Elle souligne à la fois le poids grandissant des enquêtes qui le menacent, au moins politiquement, et l’affaiblissement de la présidence à la suite du résultat des élections de mi-mandat de novembre. Car la condamnation à trois ans de prison de Michael Cohen, le 12 décembre, n’a pas mis un terme aux investigations des procureurs de New York à propos de l’achat du silence, à la veille de l’élection présidentielle de 2016, de deux femmes qui assurent avoir entretenu une relation extraconjugale, une décennie plus tôt, avec le magnat de l’immobilier. Ces transactions sont considérées comme des infractions aux règles sur le financement des campagnes électorales parce qu’elles n’ont pas figuré dans les comptes du candidat alors qu’elles ont pesé sur la campagne. Après avoir initialement nié ces relations avec une ancienne actrice de films pornographiques et un ancien modèle du magazine Playboy, le président américain a changé plusieurs fois de version. Il assure à présent ne pas avoir été informé des modalités de ces transactions, présentant son ancien avocat comme unique responsable, prêt à tous les mensonges pour obtenir la mansuétude de la justice. Sous la menace du procureur spécial Mueller « Je ne pense pas que quelqu’un puisse croire cela, a rétorqué ce dernier, vendredi 14 décembre, au cours de la matinale d’ABC, l’une des plus regardées des Etats-Unis. Tout d’abord, rien de ce qui était fait au sein de la Trump Organisation ne pouvait avoir lieu sans l’assentiment de M. Trump. Il m’a ordonné d’effectuer ces versements, il m’a ordonné d’être impliqué dans ces affaires. » De nombreux juristes considèrent qu’un président ne peut pas être poursuivi pour de tels faits pendant la durée de son mandat, mais une mise en cause directe par la justice serait très coûteuse politiquement. La veille, le Wall Street Journal avait révélé que la justice cherche à savoir si certains des principaux donateurs du comité chargé de l’investiture de janvier 2017 ont versé de l’argent en échange d’un accès à la nouvelle administration, et si des entités étrangères ont voulu faire de même en se servant de prête-noms américains. La somme record de 103 millions de dollars (91 millions d’euros) avait été rassemblée à cette occasion, un montant deux fois plus élevé que pour les précédentes cérémonies. Donald Trump est enfin toujours sous la menace de l’enquête du procureur spécial Robert Mueller consacrée aux interférences prêtées à la Russie lors de la présidentielle de 2016. Détermination démocrate Et alors que le président dénonce avec énergie une « chasse aux sorcières », une autre enquête a accrédité la thèse d’une offensive de charme visant le Parti républicain. Maria Butina, une Russe qui avait noué des contacts à partir de 2015 avec le camp conservateur à travers le puissant lobby des armes, la National Rifle Association, très liée à Donald Trump, a plaidé coupable, jeudi, d’avoir agi au profit du Kremlin, qui a de son côté dénoncé des accusations « infondées ». Donald Trump doit ajouter à cette pression judiciaire celle, politique, qui découle de la perte de la Chambre des représentants à l’issue des élections de mi-mandat, après deux ans de majorité républicaine. Il a pu mesurer cette pression, mercredi, à l’occasion d’une réunion électrique, en partie sous le regard de la presse de la Maison Blanche, avec la future « speaker » (présidente) démocrate, Nancy Pelosi (Californie), et le chef de la minorité de ce même parti au Sénat, Chuck Schumer (Etat de New York). Face à la détermination des deux élus, qui refusent de financer le « mur » qu’il a promis d’ériger sur la frontière avec le Mexique, Donald Trump a menacé de geler les fonds d’une partie du gouvernement à partir du 21 décembre. Une menace de shutdown qui pourrait se retourner contre lui, compte tenu de l’impopularité de ce type de chantage. Le shutdown a d’ailleurs été qualifié de « stupide » par le chef de la future minorité républicaine de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy (Californie), et le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell (Kentucky), n’y est pas non plus favorable. Face à cette adversité, le président apparaît isolé. Après avoir renouvelé 62 % de son administration en moins de deux ans, il doit trouver de toute urgence un nouveau chief of staff, un rouage essentiel à la Maison Blanche, après avoir poussé vers la sortie John Kelly, en poste depuis seulement dix-huit mois. Fébrilité des marchés financiers Sur le conseil de son gendre, Jared Kushner, et de sa fille Ivanka, selon la presse américaine, Donald Trump comptait le remplacer par le bras droit du vice-président Mike Pence, mais ce dernier, Nick Ayers, a préféré décliner cette offre, comme plus tard d’autres figures républicaines. Vendredi, le président s’est résigné à nommer un intérimaire, son directeur du budget, Mick Mulvaney. Défié jeudi par le Sénat dans l’affaire de l’assassinat du journaliste dissident saoudien Jamal Khashoggi imputé au prince héritier, Mohammed Ben Salman, qu’il continue de couvrir, Donald Trump ne peut guère mettre en avant, par ailleurs, des percées diplomatiques. Les négociations avec la Corée du Nord sont en apparence au point mort depuis le sommet de Singapour, en juin, avec le dirigeant Kim Jong-un, et les conditions d’une nouvelle rencontre avec son homologue russe, Vladimir Poutine, ne sont toujours pas réunies, comme l’a confirmé le conseiller à la sécurité nationale du président, John Bolton. De plus, la fébrilité des marchés financiers témoigne d’interrogations croissantes sur la pérennité de la bonne santé de l’économie américaine. Un ralentissement l’affaiblirait dans l’un des rares domaines où son action est jugée favorablement. En novembre, les bons résultats en termes de chômage et de croissance dont le président n’a cessé de revendiquer l’unique paternité n’ont déjà pas empêché les démocrates de distancer les républicains de plus de huit millions de voix, selon les résultats définitifs, dans les élections pour la Chambre des représentants, plus symptomatiques de l’humeur du pays que le renouvellement partiel du Sénat qui a tourné à l’avantage des républicains. Contrairement à 2016, où il avait été déjà nettement battu au niveau du vote populaire mais où il l’avait emporté auprès des grands électeurs, Donald Trump n’a pas dénoncé une fraude électorale pour expliquer cet écart. Et pour cause, le seul cas découvert jusqu’à présent concerne un républicain qu’il avait soutenu en Caroline du Nord et dont l’élection risque d’être annulée.
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