Retour sur Joe Dassin : l'homme qui chantait avec son cœur19 juin 2021
Retour sur Joe Dassin : l'homme qui chantait avec son cœur RTL.fr | Publié le 19 juin 2021 Par Jean-Alphonse Richard C'est en Amérique, à New York, que Joseph Ira Dassin, aussitôt surnommé Joe, a vu le jour juste avant la guerre. Descendant d'une famille d'immigrés juifs d'Odessa à qui un employé de l'immigration avait donné sans réfléchir le nom de Dassin. Premier enfant de Jules Dassin, qui après avoir appris le métier d'acteur fait ses premiers pas d'assistant réalisateur et de Béatrice Launer, une violoniste de talent qui a travaillé avec le célébrissime musicien Pablo Casals. Ses dix premières années, Joe Dassin les passe à Hollywood, avec ses deux sœurs Ricky et Julie, dans une maison près de Sunset Boulevard. D'ici, le petit garçon peut apercevoir ces collines sur lesquelles se dressent les fameuses lettres blanches qui désignent la Mecque du cinéma. C'est pour travailler avec le maître du suspense, Alfred Hitchcock, que son père Jules Dassin est venu à Hollywood. Il va y faire carrière pour devenir l'un des réalisateurs les plus en vue des studios. Joe Dassin est un garçon sage, poli, souriant qui ne fait pas parler de lui. S'il lui arrive de traîner avec son père sur les plateaux de tournage, c'est avec sa mère qu'il passe le plus clair de son temps. Prend ses premières leçons de musique et commence à chanter. Joe Dassin ne va pas goûter longtemps à la vie tranquille d'Hollywood. A partir de sa onzième année, la famille Dassin essuie une première tempête. En pleine guerre froide avec l'URSS, le sénateur McCarthy ouvre la chasse aux communistes dans l'industrie cinématographique. Hollywood tremble. Jules Dassin est sur la liste noire, placé sous surveillance, et rapidement confronté à des menaces judiciaires. La famille n'a pas d'autre choix que l'exil. Les Dassin quittent dans l'urgence la Californie et parviennent in extremis à se rendre en France. Terminé l'insouciance. Joe Dassin se retrouve pensionnaire en Suisse, à l'Institut Le Rosey, une école privée internationale pour gosses de riches. Le retour en Amérique Au cours d'une partie de fléchettes avec sa sœur Ricky, Joe Dassin va hériter d'une particularité physique qu'il ne pourra plus jamais effacer. Lui donnera des complexes et le fera souvent se détester devant un miroir. Une fléchette est venue un jour se planter dans sa tempe gauche et a sectionné un muscle. A cause de cette déficience, Joe Dassin se mettra à loucher de plus en plus fortement. Il lui arrivera, souvent, de dissimuler ce regard convergent derrière des lunettes noires. Joe Dassin, 18 ans, retrouve l'Amérique de son enfance. Inscrit à l'Université du Michigan pour y étudier la médecine, puis l'ethnologie. C'est le temps heureux du campus, des petits boulots - cuisinier, éboueur, plombier - des soirées passées avec Dorothy Sherrick, sa première petite amie - à qui il a dédie un livre de nouvelles. Loin de Paris, Joe Dassin a peu à peu pansé ses plaies avec son père qu'il revoit de temps à autre. La complicité avec sa mère, qui vit en Suisse, elle n'a jamais cessé. Et c'est en partie pour la retrouver que Joe, diplôme en poche, revient en Europe. Il a 25 ans, c'est un beau garçon, bronzé, athlétique, voix grave teintée d'accent américain. Il plait beaucoup aux filles, comme celle qu'il va rencontrer un soir du mois de décembre 1963. "Les disques sont catastrophiques, mais la voix est superbe" Joe Dassin n'a pas fait ses preuves qu'il est déjà au creux de la vague. Pourtant, Jacques Plait, le nouvel homme fort de la maison de disques est persuadé qu'il a de l'avenir. "Les disques sont catastrophiques, mais la voix est superbe", résume-t-il. Plait va donc construire un tout nouveau personnage, celui qui désormais sera sur toutes les photos. Cheveux longs pour Joe Dassin, le court est passé de mode. Tenues plus excentriques, plus pop et plus colorées, ses chemises sages d'étudiant ne sont plus dans l'air du temps. En cette année 1967, Joe Dassin a reçu les paroles d'une chanson écrite sur un capot de voiture, par un jeune auteur, Frank Thomas, qui venait de feuilleter un livre consacré aux hors la loi de l'Ouest américain. Joe compose la musique, mais ne veut pas interpréter lui même cette chanson qui parle de quatre frères hors la loi. Il la trouve trop loufoque. Il la destine à Henri Salvador. C'est pourtant bien Joe Dassin qui va l'interpréter, pas le choix. Contraint et forcé par la maison de disque enthousiaste et qui a eu du nez. Dès leur sortie, les Dalton vont écraser la concurrence. Dans la rue, on va alors commencer à reconnaître Joe Dassin. Derrière le rideau, de la réussite Joe Dassin n'est pourtant pas très à l'aise avec cette vie qui s'emballe. Il est rongé par l'anxiété. La peur de mal faire, ne pas pouvoir tenir son rang. Ses chansons plaisent et celle qu'il a écrit pour France Gall est un succès. Pourtant le doute est là, permanent, envahissant, usant : "Ca ne marche pas trop mal, mais je ne suis qu'une semi-vedette", déplore-t-il un jour. Jamais un chanteur n'aura été aussi peu sûr de sa réussite. Est-ce donc pour se rassurer qu'il fume cigarettes sur cigarillos, touche un peu trop souvent à l'alcool et consommera bientôt de la cocaïne? Peut-être.
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