Etats-Unis : Donald Trump essaie de profiter de l’escalade de la violence à Portland31 août 2020
Etats-Unis : Donald Trump essaie de profiter de l’escalade de la violence à Portland Le Monde.fr | Publié le 31 août 2020 | 05:51 Par Corine Lesnes C’est l’engrenage dont les démocrates craignent qu’il ne joue au profit de Donald Trump. Une escalade dans la violence entre partisans et adversaires du président sortant. Samedi soir 29 août, à Portland (Oregon), l’un des hauts lieux des manifestations antiracistes qui se poursuivent sporadiquement dans nombre de villes américaines, la confrontation a fait un mort : un militant d’extrême droite venu participer à un rassemblement pro-Trump, tué lors d’une fusillade. Un homicide qui s’ajoute aux deux décès survenus le 25 août à Kenosha (Wisconsin) en marge des protestations contre les violences policières et des contre-manifestations d’extrême droite. Portland, ville très progressiste au milieu d’un Etat rural et conservateur, attire depuis des mois les foudres de la Maison Blanche, qui en a fait le symbole des calamités – « émeutes, pillages, incendies volontaires, violence » – qui attendent les Etats-Unis en cas de victoire du candidat démocrate à l’élection présidentielle du 3 novembre. « Ne vous y trompez pas. Si vous donnez le pouvoir à Joe Biden, la gauche radicale va couper les vivres des commissariats de police dans toute l’Amérique, a lancé Donald Trump dans son discours de clôture de la convention républicaine, le 27 août. Toutes les villes vont ressembler à Portland la démocrate. » Un seul épisode de pillages Ville de tradition ouvrière, devenue capitale du street art, Portland, 650 000 habitants, a battu les records de mobilisation. Tous les jours, depuis le 25 mai, date de la mort de George Floyd à Minneapolis (Minnesota), Black Lives Matter (BLM) continue de manifester devant le palais de justice. Ils sont quelques dizaines, parfois quelques milliers, comme la semaine dernière, quand Jacob Blake a été blessé de sept balles dans le dos par la police à Kenosha. Si les affrontements sont quasi quotidiens à la nuit tombée avec la police – qui a arrêté plus de 200 personnes depuis le 1er août –, la ville n’a connu qu’un épisode de pillages, dans les premiers jours du mouvement. Samedi soir était le jour 93 de la mobilisation. Deux jours après la fin de la convention républicaine, les partisans de Donald Trump avaient eux aussi décidé de descendre dans la rue, pour un rassemblement motorisé. Selon le journal The Oregonian, plus de mille véhicules étaient au rendez-vous, sur un parking du centre commercial de Clackamas, à une vingtaine de kilomètres de Portland. En fin d’après-midi, des centaines de militants sont arrivés en ville, juchés sur de volumineux pick-up, bardés de gilets pare-balles et de drapeaux. Vers 18 heures, les premiers incidents ont eu lieu lorsque des contre-manifestants ont essayé de bloquer les véhicules trumpistes. Il y a eu des échanges de coups de poing, puis des lancers de projectiles lorsque les automobilistes sont allés parader autour du Justice Center, le cœur de la mobilisation Black Lives Matter. La fusillade a eu lieu vers 20 h 45, alors que le cortège avait quitté le centre-ville. La victime, un homme à pied, a été tuée d’une balle dans le torse. Le meurtrier n’avait pas été publiquement identifié ou arrêté dimanche. Les autorités n’avaient pas non plus révélé l’identité de la personne décédée, mais le chef du groupuscule d’extrême droite Patriot Prayer, Joey Gibson, a affirmé qu’il s’agissait d’un des amis de son groupe, du nom d’Aaron Jay Danielson. Basé à Portland, le mouvement « Prière patriotique » est relativement connu sur la Côte ouest. A l’été 2017, au lendemain du rassemblement de suprémacistes blancs de Charlottesville (Virginie), M. Gibson avait essayé d’organiser un rassemblement pro-armes et pro-Trump à San Francisco, ville à 80 % démocrate. Sans succès, il s’était replié à Berkeley, le fief des activistes antifascistes, tous prêts à en découdre eux aussi, mais il avait dû être évacué par la police. Pour le Southern Poverty Law Center (SPLC), l’organisation qui étudie les extrémistes, le but de Patriot Prayer est de « provoquer [les « antifas »] pour les amener à se livrer à des actes de violence ». « C’est vous que l’Amérique a besoin de voir stoppés » Dimanche, le maire de Portland a appelé « ceux qui veulent venir faire justice eux-mêmes » à s‘abstenir de pénétrer en ville. En même temps, il a imploré les partisans de BLM « à ne pas mordre à l’hameçon » de la violence. L’élu démocrate est d’autant plus furieux qu’il a vu monter la confrontation : le 22 août, des centaines de Proud Boys, un groupe désigné comme propagateur de haine (« hate group ») par le SPLC, étaient déjà venus défier Black Lives Matter, avec des boucliers et des matraques. « Maintenant vous voulez que je mette un terme à cette violence que vous avez contribué à créer. C’est vous que l’Amérique a besoin de voir stoppés », a poursuivi le maire. Donald Trump a de son côté retweeté une vidéo montrant ses partisans faisant usage de paintballs et de gaz poivré contre les manifestants à pied. « Le grand retour de bâton en cours à Portland ne peut pas être inattendu », a-t-il commenté. Un peu plus tôt, sa conseillère Kellyanne Conway avait exposé sur Fox News que « le chaos et l’anarchie » ne peuvent que profiter à la réélection du président sortant, les électeurs ayant une vision plus claire de « qui est le meilleur sur la loi et l’ordre ». M Trump compte d’ailleurs se rendre à Kenosha mardi 1er septembre. Joe Biden a condamné dimanche « sans équivoque » cette violence « inacceptable » : « Quelle que soit la forme qu’elle prend et d’où qu’elle vienne, de la gauche ou de la droite, a-t-il commenté. Et je mets au défi Donald Trump de faire de même. » Parallèlement, l’ancien vice-président a annoncé un meeting lundi à Pittsburgh, en Pennsylvanie, pour la première fois depuis longtemps en personne. Avec un discours en forme de question aux électeurs : « Etes-vous en sécurité dans l’Amérique de Donald Trump ? »
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