Coupe du Monde féminine de football: les Américaines ont-elles des points faibles?28 juin 2019
Coupe du Monde féminine de football: les Américaines ont-elles des points faibles? Le Point.fr | Publié le 28 juin 2019 | 6:47 « Les États-Unis ont la meilleure équipe et la deuxième meilleure équipe du monde. » Si certains ont décelé dans les propos d'Ali Krieger, la latérale américaine, de l'arrogance, d'autres ont plaidé pour la plaisanterie, ou encore un message de confiance destiné aux remplaçantes qui jouent rarement. Quoi qu'il en soit, et même si c'est exagéré, on doit admettre qu'il y a une part de vérité dans les déclarations de la joueuse d'Orlando Pride. Après avoir écrasé la Thaïlande 13 à 0, la sélectionneuse Jill Ellis a effectué… sept changements ! C'est donc une véritable équipe bis qui a affronté le Chili lors du deuxième match de poules. Résultat : succès 3-0, les trois buts en première période, possession de balle à 68 %. « Si on affrontait la France avec notre seconde équipe, c'est elle qui nous battrait, précise dans L'Équipe l'ex-internationale et capitaine Julia Foudy. Mais nous avons la meilleure sélection qu'on ait vue depuis longtemps en termes de profondeur de banc. » En démonstration sur le sol français, les Américaines ont terminé le travail face à la Suède – une grande nation du football au féminin – en s'imposant 2-0, avec leur équipe type. « Je ne suis pas inquiet, prend à contre-courant Patrice Lair, l'entraîneur multititré de l'OL au féminin (2010-2014). Techniquement, tactiquement, on est plus forts. Si notre colonne Renard-Henry-Le Sommer est bien sur le plan physique, on va battre les Américaines. Avec aussi une Sarah Bouhaddi au top dans les buts, c'est important. » De l'impact pour mettre en valeur la qualité techniqueQuand Patrice Lair nous glissait cette confidence, les États-Unis n'avaient pas encore douté ni souffert contre l'Espagne en huitièmes de finale. En effet, le monde entier promettait l'enfer aux Espagnoles. Elles furent pourtant les premières footballeuses de l'été à mettre en difficulté les stars américaines. C'est un coup du sort – un penalty accordé par l'arbitrage vidéo – qui a permis aux joueuses de Jill Ellis de s'en tirer sans prolongations (2-1, doublé sur penalty de Rapinoe). Dans la salle de soins de Clairefontaine, les titulaires françaises regardaient le match sur leurs tablettes, forcément regonflées par cette soudaine vulnérabilité des championnes du monde. « Ce match a permis aux Bleues de voir que c'était possible, explique Sabrina Delannoy, consultante TF1. La stratégie des Espagnoles leur a donné beaucoup de clefs. C'est positif, car c'est la première fois qu'on voyait les Américaines douter. » L'ancienne joueuse du PSG et des Bleues (39 sélections) a commenté États-Unis-Espagne sur TMC et analyse ce match sous le prisme du quart de finale à venir : « Les Américaines exercent un gros pressing sur le porteur de balle. C'est sur le plan athlétique que l'écart est le plus important avec les autres nations, dont la France. Par leur gabarit, leur explosivité, la puissance et l'impact qu'elles mettent dans les duels, elles sont supérieures. Les Espagnoles l'ont compris et ont répondu à ce défi, mais elles manquaient de peps pour prendre le dessus. Sur le plan technique, on a les joueuses qui peuvent faire des différences individuelles, dribbler, apporter de la percussion offensive, avec Diani, Le Sommer et Cascarino. » Cela fait des mois que le staff français prépare ce quart de finale, le plus grand défi de l'ère Corinne Diacre. Ces derniers jours, dans la moiteur caniculaire de Clairefontaine, les entraîneurs ont distillé leurs dernières consignes tactiques, qui vont dans le sens de l'analyse de Delannoy. « Les joueuses devront être dans l'impact au moment où leur adversaire reçoit le ballon, explique l'entraîneur adjoint, Frédéric Joly. Pour, premièrement, les repousser et, deuxièmement, récupérer le ballon. » Françaises et Américaines ont l'habitude d'avoir la possession de balle : 63 % en moyenne pour les États-Unis, 58 % pour la France. Comment tenir le ballon face à la meilleure équipe du monde ? « On peut aussi avoir la possession et perdre, rétorque Corinne Diacre en conférence de presse. On verra si la France et les États-Unis se neutralisent. L'idéal serait d'être à 50-50 et de gagner. » Battre les États-Unis, les Bleues savent le faire. Contrairement aux idées reçues, la France a – dans son histoire récente – souvent trouvé la clef face à Rapinoe and co. Sur les quatre dernières affiches, le bilan tricolore est positif : 2 succès, 1 nul et 1 défaite. C'est malheureusement lorsque cela compte vraiment que les Américaines sont les meilleures. Leur dernière victoire face aux Françaises date de la dernière compétition, au premier tour des Jeux olympiques en 2016 (1-0, but de Carli Lloyd). Ce soir-là, à Belo Horizonte, on retrouvait dans la composition de Philippe Bergeroo 7 titulaires (Bouhaddi, Renard, MBock, Majri, Bussaglia, Henry, Diani) qui devraient entamer le match ce vendredi au Parc des princes, preuve, au passage, que Corinne Diacre n'a pas tout révolutionné dans cette équipe de France. La dernière fois que les Bleues ont battu les stars du soccer, c'était au début de l'année, au stade Océane, en amical (3-1, doublé de Diani, but de Katoto), mais les États-Unis n'avaient pas aligné toutes leurs titulaires. La preuve que les Américaines n'ont pas forcément les « deux meilleures équipes du monde ». Elles sont déjà championnes du monde en titre, et c'est bien suffisant ainsi pour inquiéter les Bleues. Les « poisons » américains :Alex Morgan (Orlando Pride, 29 ans) L'éphémère attaquante de l'Olympique lyonnais, égérie du soccer aux États-Unis, a inscrit un quintuplé face à la Thaïlande, avant de disparaître progressivement des radars, notamment face à l'Espagne. L'avis de Sabrina Delannoy : « La manière dont les Espagnoles ont défendu montre qu'elles ont tout compris. Les défenseuses centrales l'ont complètement bloquée. Pour ça, il faut évidemment commettre des fautes. On a souvent vu Morgan à terre. Elles l'ont empêchée d'être performante, et cela transparaît sur l'équipe entière. Wendy Renard et Griedge Mbock vont devoir anticiper, suivre Morgan et l'empêcher de se tourner vers le but. » Tobin Heath (Portland Thorns, 31 ans) L'attaquante américaine se méfie des Bleues : « Offensivement, elles sont explosives, elles ont une puissance de feu. Elles ont de bonnes joueuses en défense, c'est une équipe équilibrée. » Malgré ces louanges, les Tricolores devront garder un œil sur cette joueuse exceptionnelle. L'avis de Sabrina Delannoy : « Tobin Heath est imprévisible. Elle se remet dans le sens du jeu avec une grande facilité pour entrer dans la surface. Ensuite, sa qualité de dribbles extraordinaire paye. Attention à ne pas commettre de fautes dans la surface. » Lindsey Horan (Portland Thorns, 25 ans) La milieu de terrain, auteure de 3 buts dans ce Mondial, pourrait retrouver une place de titulaire après avoir débuté sur le banc contre l'Espagne. L'avis de Sabrina Delannoy : « Dans les duels, c'est la meilleure. Elle est impressionnante quand elle va au contact. Dans les airs, elle attire tout le ballon. » Le point faible made in USAAlyssa Naeher (Red Stars de Chicago, 31 ans). Les États-Unis ont longtemps eu la meilleure gardienne du monde, avec l'extravagante Hope Solo. Connue aussi pour ses frasques hors football, Solo n'en était pas moins la seule à faire oublier que le poste de gardien de but était l'énorme point faible du football féminin. Durant cette Coupe du monde en France, les gardiennes ont particulièrement impressionné, à l'image de la parade de la Suédoise Lindhal sur un penalty canadien, ou des performances impeccables de la gardienne argentine Vanina Correa ou de Sarah Bouhaddi. Aux États-Unis, on a plus de doutes… « Naeher a été peu sollicitée, mais elle est responsable sur le seul but encaissé par les États-Unis, confirme Delannoy. Sur les relances au pied, elle n'est pas infaillible. » Les Bleues devront s'en souvenir…
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