Piano: Haïti, nouveau terrain de jeu4 juillet 2017
Piano: Haïti, nouveau terrain de jeu Liberation.fr | Publié le 30 juin 2017 | 17:15 Par Christophe Berlet Le piano à queue Yamaha C7X est long de 2,27 mètres, large d’1,55 mètre et pèse 415 kilos. Ce modèle, «par ses performances exceptionnelles et sa taille, équipera les conservatoires, les nombreuses salles de concert et auditoriums ne pouvant disposer d’un grand [piano de] concert», explique le site Yamaha. Il coûte la bagatelle de 30 000 euros. Enfin, celui qui se trouve actuellement au Panama et que souhaite acquérir la pianiste Célimène Daudet coûte 30 000 euros. La musicienne a un projet pour ce piano. Elle a toujours des projets. Il y a quelques années, avec Amanda Favier, elle avait eu le projet d’exhumer la musique de Lucien Durosoir dans la Malle du poilu. Ensuite elle s’est attaquée, toujours avec Favier, aux sonates pour violon et piano de Beethoven. Et aujourd’hui, elle veut acheter ce piano. Et l’envoyer à 7 400 kilomètres de là. A Haïti. Mais pourquoi voulez-vous monter une telle opération ? Je suis moitié haïtienne, par ma mère. Je suis allée à Haïti lorsque j’étais enfant, et puis plus du tout pendant des années. J’ai baigné dans cette culture : ma mère me parlait créole. Je voulais y retourner pour donner un concert. Mais depuis le séisme de 2010, il est impossible de trouver un piano de concert en état de marche. Il y a des pianos à queue. Mais il y manque certaines touches ou certaines cordes. Ce n’est même pas ce qu’on appelle, nous, des mauvais pianos. Je me suis dit qu’il fallait faire venir un piano. Ce n’est pas parce que les Haïtiens manquent de tout qu’ils doivent avoir un piano hors d'état de marche. Si l’on décide de donner un concert, la qualité musicale doit être la même à Haïti qu’ailleurs. Il fallait donc faire venir un piano de concert en Haïti. Comment vous y prenez-vous ? Avec des amis, nous avons formé une équipe d’une dizaine de personnes pour financer l’achat du piano. Et puis autant voir grand : si nous y parvenons, il ne faut pas qu’il serve pour un seul concert. Je me suis mis en tête de monter un festival plutôt qu’un concert. En Haïti, il y a peu de chose pour développer le secteur culturel. Ce piano ne nourrira personne mais ce n’est pas une raison pour s’en priver. L’art est un vecteur d’épanouissement et de développement. Il fait partie des besoins primaires. Comment avez-vous organisé tout cela ? Je suis donc partie trois semaines à Haïti, pour savoir si l’opération était faisable. J’ai demandé à des Haïtiens si le projet leur faisait envie ou si c’était une lubie occidentale. Je me suis rendu compte qu’ils veulent surtout qu’on parle de leur pays en d’autres termes que les éternelles catastrophes ou situation de pauvreté. A priori, l’idée d’un festival leur plaît, et pas uniquement les personnes qui pourraient graviter dans le monde de la musique. Vous étiez persuadée d’avoir assez d’argent pour acheter le piano ? A l’époque il manquait les trois quarts du prix, mais j’étais sûre que le projet était réalisable. Je suis hyper confiante. Je sais que je l’aurai. Il nous manque un peu moins de 4 000 euros. Que deviendra-t-il, ce piano que vous n’avez pas encore ? Il restera là-bas. S’est ensuite posée la question du stockage du piano si tant est qu’il arrive. Il ne faut pas qu’il soit volé ou vandalisé, et il faut qu’il puisse être accessible, qu’il serve. Nous avons monté un partenariat avec une école basée à Haïti, l’Artists Institute, où sont dispensées des formations audio et vidéo : ils garderont le piano, l’assureront et filmeront les concerts du festival. En échange le piano leur servira dans l’année pour des enregistrements.
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