19 octobre 2013
Dénationnalisation des descendants haïtiens- Des leaders caribéens mettent la pression sur les autorités dominicaines Le Nouvelliste | Publié le :16 octobre 2013 Joubert Rochefort [email protected] Des chefs de gouvernement de plusieurs pays de la Caraïbe condamnent la décision de la Cour constitutionnelle dominicaine de dépouiller de leur nationalité des descendants d'Haïtiens nés en République dominicaine à partir de 1929. Le Premier ministre de Saint-Vincent-et -les-Grenadines, Ralph E Gonsalves, est très acide contre la décision des autorités dominicaines. Dans une lettre adressée au président dominicain Danielo Medina le 11 octobre, il se dit profondément attristé par la décision de la Cour constitutionnelle dominicaine d'enlever la nationalité dominicaine aux personnes nées dans le pays de parents haïtiens depuis plusieurs décennies. « Cette décision est largement interprétée comme une campagne fondée sur le racisme. Sincèrement, cette décision de la Cour constitutionnelle est inacceptable dans n'importe quelle communauté et c'est un affront à la mise en place des normes internationales. Ces traitements feront de la République dominicaine un paria dans la région », écrit le Premier ministre Ralph E Gonsalves. L'ancien Premier ministre jamaïcain PJ Patterson abonde dans le même sens. Il invite les 15 membres formant la Communauté des Etats de la Caraïbe (Caricom) à condamner la décision du gouvernement dominicain qui vise à dénationaliser des milliers de personnes d'origine haïtienne. « Nul ne peut être rejeté dans un clin d'oeil de cette façon à cause de cette loi discriminatoire. Dans la région, nous avons l'obligation de prendre des décisions et nous ne pouvons pas permettre à ces inégalités d'aller aussi loin sans nos plus fermes condamnations », a déclaré Patterson à la Caribbean Media Corporation (CMC). L'ancien chef du gouvernement jamaïcain PJ Patterson, un acteur majeur dans les efforts visant à l'intégration d'Haïti dans le mouvement régional, s'interroge sur le silence des dirigeants régionaux sur la question. « La décision des autorités dominicaines doit être un sujet de grande préoccupation pour tout le monde dans la région. En plein XXIe siècle, dit-il, il ne doit y avoir aucun pays qui cherche à déterminer la base de la citoyenneté sur l'ascendance qui précède l'année 192. » La semaine dernière, le Secrétaire général de la Caricom, Irwin La Rocque, avait fait savoir que cette décision soulève un grave problème de statut pour plusieurs milliers de personnes. « Je crois qu'il y a plus de 20 000 ressortissants dominicains d'origine haïtienne qui seraient touchés. » Dans une interview accordée au Caribbean Media Corporation, La Roque dit espérer que les républiques voisines trouvent un moyen d'aborder paisiblement la question. « Je veux juste reconnaître que le peuple haïtien a contribué au développement du secteur agricole en République dominicaine et je pense que cela doit signifier quelque chose dans les discussions à l'avenir », avait-il souligné. De son côté, le Premier ministre trinidadien, Kamla Persad-Bissessar, n'y va pas avec le dos de la cuillère. Elle qualifie la décision de discriminatoire. « Je crois que les différents pays de la région ont intérêt à trouver une solution à ce problème. En particulier, la Caricom, dont Haïti est un membre à part entière. Ces pays, dit-elle, ont un rôle majeur à jouer dans la recherche de cette solution, dans un contexte où la République dominicaine cherche à intégrer l'organisation. » Dans la foulée, elle promet qu'en sa qualité de président en exercice de la Caricom, elle entrera en consultation avec le Secrétaire général de l'organisation régionale, en vue d'explorer la meilleure voie vers la résolution du problème. Pour sa part, le bureau du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'homme basé à Genève a invité les autorités dominicaines à s'assurer que la décision n'a pas laissé des personnes d'origine haïtienne dans « les limbes constitutionnels». En République dominicaine, des centaines de manifestants dominicains n'ont pas ménagé leurs mécontentements. La semaine écoulée, ils ont organisé à l'Université autonome de Santo Domingo (UASD) un sit-in, pour affirmer leur rejet de la décision du tribunal constitutionnel, en raison de la violation de la Constitution et des traités internationaux de droits humains dont l'Etat dominicain est signataire. Ils soutiennent que c'est une injustice d'enlever la nationalité à 4 générations de personnes qui, durant 8 décennies, ont été enregistrées comme Dominicains, sous l'égide de la Constitution et des lois en vigueur. Une étude soutenue par l'Onu, publiée cette année, estime à environ 210 000, le nombre de personnes nées en République dominicaine d'origine haïtienne. De plus, elle mentionne que 34 000 autres ressortissants sont nés de parents d'autres nationalités. Toutefois, le gouvernement de la République dominicaine estime que près de 500 000 personnes nées en Haïti vivent en République dominicaine. Jusqu'en 2010, les autorités dominicaines ont accordé automatiquement la citoyenneté à toute personne née sur le sol dominicain. Une décision qui vient d'être modifiée après la promulgation d'une nouvelle Constitution stipulant que la citoyenneté ne serait accordée qu'aux personnes nées d'un parent dominicain ou des résidents légaux étrangers. Joubert Rochefort [email protected]
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