Ariel Henry, un premier ministre sans président, prend les rênes d’Haïti20 juillet 2021
Ariel Henry, un premier ministre sans président, prend les rênes d’Haïti AlterPresse.org | Publié le 20 juillet 2021 Par Gotson Pierre Un large consensus et un accord politique restent encore à trouver. La cérémonie d’installation du nouveau premier ministre Ariel Henry est annoncée pour ce 20 juillet, après la formation, la veille, de son cabinet ministériel, observe AlterPresse. Ariel Henry prend ainsi les rênes du pays, environ deux semaines après l’assassinat du président Jovenel Moïse, qui ne sera visiblement pas remplacé. Moïse l’avait nommé deux jours avant son assassinat, le 7 juillet dernier, et l’intérim a été assuré par Claude Joseph, depuis la démission de Joseph Jouthe, en avril dernier. Ariel Henry, 71 ans, septième personnalité nommée par Jovenel Moïse pour diriger une équipe gouvernementale, depuis son accession au pouvoir en 2017, est un neuro-chirurgien, ancien ministre de l’intérieur puis ministre des affaires sociales en 2015 sous la présidence de Michel Martelly. Méfiance et déception Le nouveau gouvernement entrera en scène dans une ambiance qui fait douter d’un possible apaisement, des partis d’opposition l’ayant globalement boudée, jugeant que les choix effectués par Ariel Henry ne reflètent pas un esprit de consensus. Ce consensus scellé par un accord politique est considéré incontournable, du fait que cette situation d’exception est sans précédent et n’est pas prévue par la constitution en vigueur. Les premières réactions observées par AlterPresse reflètent la méfiance et la déception. L’ancien député Jean Robert Bossé, de l’Organisation du peuple en lutte (Opl) exprime sa déception sur son compte Twitter : « Plus ça change, plus c’est la même chose. Un cabinet ministériel qui traduit dans les faits la "dernière volonté de l’assistant de Dieu" dont on parlait tant depuis son assassinat. Le roi est mort, vive le roi ! Le roi ne meurt jamais, tout comme "l’assistant de Dieu" », écrit-il. « Un Premier Ministre de facto et des Ministres sans décharge. C’est le règne de l’impunité. Le procès de la Consolidation (Petrocaribe) n’aura pas lieu. Le procès des massacres n’aura pas lieu. Les corrompus et les corrupteurs pourront désormais dormir tranquillement », ajoute-t-il. André Michel, porte-parole du Secteur démocratique et populaire (Sdp), avait prévenu : « Monsieur Ariel Henry n’a pas les provisions légales et constitutionnelles pour monter un Gouvernement. La Communauté internationale est en train de faire fausse route. Il faut un consensus largement large, assorti d’un accord politique, pour sortir de l’impasse politique actuelle ». Même son de cloche de la part de l’ancien sénateur Youri Latortue : « ARIEL HENRY-PM Nommé-ne peut former seul un nouveau Gvt/Art149 Constitution traite d’un PM déjà en fonction-Le cas actuel est dépourvu de provisions légales-le nouveau Gvt. doit sortir d’un consensus politique ». Le Konbit des organisations politiques, populaires et syndicales penchait également en faveur d’un « consensus » pour éviter la « continuité », éviter donc que le Parti haïtien tèt kale (Phtk) ne se renouvelle au pouvoir, ont souligné les responsables de ce regroupement lors d’une conférence de presse le 19 juillet. L’économiste Emmnauella Douyon, du collectif Nou pap dòmi considère la mise en place de la nouvelle équipe gouvernementale comme une « mauvaise blague ». « Les fossoyeurs de la République sont déjà prêts à poursuivre leur oeuvre. Il faut vraiment haïr Haïti pour appuyer cette démarche immonde. Malheur à celui par qui le scandale arrive ! J’ai appris tôt qu’Haïti est une terre glissée. Accrochez-vous ! », met-elle en garde sur son compte Twitter. Nou pap dòmi est partie prenante d’une Commission de la société civile haitienne pour la recherche d’une solution haïtienne à la crise. Un processus de dialogue intersectoriel a été mis en place à cet effet par cette entité. Des élections au plus vite Mais le Core Group, composé des ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union Européenne, du Représentant spécial de l’Organisation des États Américains et de la Représentante spéciale du Secrétaire Général des Nations Unies, a fait pression pour la mise en place rapide d’un nouveau gouvernement, pourtant « consensuel et inclusif ». Cette nouvelle équipe gouvernementale sera à coup sûr chargée d’organiser les élections générales le plus vite possible. Actuellement, la date retenue pour les élections générales est le 26 septembre. La réalisation des élections dans les conditions générales et techniques actuelles représente une véritable gageure. Conseil électoral décrié, environ la moitié des électeurs non enregistrés, insécurité et violence très élevées, pas d’accord politique… A moins que ces élections débouchent sur une nouvelle crise plus profonde.
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